Folia, de Mourad Merzouki

Une salle debout, hurlant sa joie à pleins poumons, face aux danseurs rayonnants, à la fin du spectacle “Folia” de Mourad Merzouki… Les artistes saluent, ils jubilent, la salle applaudit à tout rompre, riant en retour : c’est l’effet Merzouki, dont on avait déjà pu apprécier les vertus euphorisantes avec Boxe, boxe, en 2017 au Théâtre du Rond-Point. Comme alors, les musiciens sont parmi les danseurs, dans des décors post-apocalyptiques ou Grand Siècle, sous des lumières qui sculptent les corps et enveloppent de mystère la scène.

Pendant une heure, nous avons été emportés par les rythmes populaires et effrénés des tarentelles du sud de l’Italie et par des airs poignants de Vivaldi, joués et chantés par les musiciens baroques du Concert de l’Hostel-Dieu, sur des instruments anciens. Vêtus de somptueux costumes XVIIIe siècle et d’abord dissimulés dans des décors de citrouilles-carrosses, ils glissent parmi les danseurs.

Ceux-ci, écrasés au sol sous le poids d’un inénarrable malheur, rampent et se tordent, désarticulés, dans un océan de sons électroniques sourds et oppressants. Peu à peu, ils se relèvent, aspirés par une tarentelle endiablée, musique littéralement thérapeutique puisqu’elle était censée guérir de la morsure de la tarentule… Et c’est l’explosion, les figures inspirées du hip-hop, deux à deux, en quadrille ou en groupe (cinq couples ou jusqu’à douze danseurs sur la scène) se multiplient dans une harmonie stupéfiante, parmi de grosses planètes élastiques sur lesquelles rebondissent les corps, dans une allégresse communicative, une absence de compétition, une étrange sensation de solidarité…

La chanteuse, Heather Newhouse, voix céleste, tourne autour des danseurs, les musiciens aussi, installés dans leurs coques-citrouilles, le public est bouche bée.  Tout le spectacle baignera dans cette ambiance de dynamisante folie, mêlant les riches figures du hip-hop à la danse contemporaine et à la danse classique. On assistera même à une parodie tendre de Coppélia. Plus tard, deux danseuses, elles aussi en pointes, animeront un amusant duo. Le spectacle se clôt sur la rotation en toupie d’un derviche tourneur habité, apportant une note extatique, sinon mystique.

Tous les genres sont mêlés comme le sont les musiciens aux danseurs : la soprano sera portée comme une danseuse étoile pendant qu’elle chantera son aria de Vivaldi, et le derviche tourneur poursuivra sa rotation de toupie parmi les danseurs lâchés dans une course maîtrisée.

Les cris de bonheur du public à la fin du spectacle sont si impressionnants qu’on ne peut s’empêcher de penser à l’enthousiasmós des Grecs de l’Antiquité qui signait l’inspiration, voire la possession par le divin. Pour Mourad Merzouki, “ce spectacle est un vrai pari”. Il l’a gagné au-delà de toutes les espérances, qu’il soit remercié pour le bonheur que lui et sa formidable compagnie nous donnent. 

Théâtre 13ème Art, Place d’Italie, dans le Centre commercial Italie 2, au cœur du 13e arrondissement.  01 53 31 13 13 ou adresse e-mail : billetterie@le13emeart.com 

Jusqu’au mardi 31 décembre, 21h. Durée: 1h15
De 29 à 65 euros.

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2 réponses à Folia, de Mourad Merzouki

  1. Monica D dit :

    Merci Fabienne pour cet article digne d’un spectacle qui m’a, moi aussi, enthousiasmée et transportée. La musique, comme la chorégraphie variée et inventive, sont aussi une thérapie pour chaque spectateur. L’énergie, la générosité et la liberté de cette “Folia” ne peuvent que nous rendre heureux.
    Comme l’a dit un spectateur en sortant : avec ce spectacle on oublie le froid, la pluie et les problèmes de transports…

  2. fabienne dit :

    Et encore merci à toi, pour m’avoir prévenue et pour avoir pris les places! On a vécu une vraie expérience de joie collective, c’était splendide…

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