Première rencontre du héros avec l’héroïne, p.27: ” Comme elle a l’air d’attendre sa réaction, il se contente à ce moment-là – mais sans qu’il y ait aucune volition consciente de sa part – de lui toucher l’oreille avec sa main.
Il ne se passe rien d’autre. Elle ne repousse pas sa main, ne s’en empare pas non plus, si bien que pendant quelques fractions de secondes, son bras demeure suspendu en l’air.”
Plus chichiteux, tu meurs:volonté, nein! Volition, Ja wohl, sehr elegant!
Et le bras suspendu pendant quelques fractions de secondes, vous le voyez, vous? Moi, pas du tout. Quel érotisme torride, de surcroît…
“Et puis, elle l’impressionnait, elle avait connu John Cage et Merce Cunningham et elle adorait la littérature allemande, avec une prédilection pour Elias Canetti. On peut presque dire qu’il est sorti avec elle pour savoir en quoi consistait le génie de Canetti sans se donner la peine de le lire”(p. 47).
Merce Cunningham: OK. John Cage, mort en 1992, c’est toute petite qu’elle l’a connu ou alors le temps du roman n’est pas le temps actuel. Mais John Cage, c’est plus chic que Johnny Hallyday, j’en conviens.
Passons à Elias Canetti. Pour ceux qui l’ignorent, voilà un écrivain d’origine bulgare, devenu citoyen britannique en 1952 et qui a écrit une vaste autobiographie en allemand, quelques pièces de théâtre et un seul roman. Mlle Nora n’est fan ni de Goethe, ni de Schiller, ni de Kafka, ni de Thomas Mann, ni de Thomas Bernhard, ce qui serait d’une affligeante banalité. Elle adoooore Elias Canetti, et ça, à notre héros, ça lui en bouche un coin! Quel cuistre, ce Lapeyre!
Il faut dire que Nora est la fille cadette d’une “famille dysfonctionnelle” (p. 58):comme c’est réussi comme expression, une famille dysfonctionnelle!
“Sans cesser de converser avec son visiteur, il aspire délicatement la poussière des cactus en pot, avant d’en nettoyer les feuilles à l’aide d’un coton imbibée d’eau déminéralisée” (p.69).
Nettoyer les feuilles des cactus, moi, je dis chapeau! Pour les épines, il est plutôt conseillé d’utiliser un petit aspirateur…
Première nuit d’amour après leurs retrouvailles (p. 91): “Blériot a l’impression que leur étreinte va pouvoir durer des heures et des heures et qu’ils sont partis pour battre des records qui ne seront jamais homologués.”
Cuistre et fanfaron, il a tout pour plaire, ce héros! Pour l’émotion et la sensualité, on repassera…
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Ahah, mais ce roman est peut-être une comédie, non ? :)
En tout cas, merci Fabienne pour nous épargner ce livre qui n'a pas l'air très bon !
Marie
Hélas, Marie, non, ce roman se veut très sérieux, et certains ont parlé d'un roman proustien : de quoi me faire hurler de rage, moins qui aime tant mon petit Marcel!
C'était peut-être un cactus épilé ? Tu connais la fureur de la mode de l'épilation...
Coquine de Mumu, je t'ai reconnue : après tout, qui sait?